ELYAS DRAZE DOGWOOD - L'indécrottable a encore frappé.

Je n'ai ni commencement ni fin. Je suis un peu comme le monde. Ou est-ce l'univers ? Bref, vous comprenez l'idée. On voit pas trop quand je suis apparu, on sait pas trop quand je disparaîtrais. Tout ce qu'on peut dire, en fait, c'est que je suis là, tout de suite. C'est un fait inexplicable.
J'ai la tête vide.
Je ne me souviens pas, de rien, de ma naissance, de ma croissance, la mémoire vide. Personne a pensé à écrire mon histoire, et aucun scientifique fait des théories de Big B-Elyas. Du coup j'ai rien. C'est comme si ça n'avait jamais exister. Je suis peut-être une apparition. Une sorte de messie insoupçonné, à qui on aurait oublié de donner le message à transmettre. Faudrait être con alors. Parce pour l'instant, j'ai rien. C'est tout vide.
Ou alors plein de truc inutile.
J'aurais envie de dire c'est comme une coquille vide, mais pas vraiment vide. Ya pleins de trucs de tout partout, mais c'est pas vraiment bien rangés. Tu vois ? Une chambre d'ado pas très méthodique. Comme si on m'avait volé toutes mes étagères suédoises. C'est terrible. Alors c'est l'bazard et j'trouve rien. J'ai bien fais des tas, essayant de catégoriser un peu, mais c'est compliqué. Parfois les trucs sortent, quand j'vois un visage ou autre, toutes les données sur la chose apparaissent. C'est genre un fil de lien qui s'active. Mais parfois le fil il part chelou, et j'arrive pas bien à l'contrôler. Alors j'trie comme je peux, mais ça reste dur.
Faut s'imaginer une déchetterie.
En oubliant tous les clodos chelou qui fouillent partout.
Parce qu'en fait, ya que moi qui me dépatouille, avec mes dix doigts.
C'est super compliqué de s'occuper d'un truc pareil tout seul, v'savez. Tu voudrais te concentrer sur un truc, mais c'est toujours tout petit, puis après tu regardes tout ce qui reste, alors tu préfères faire un peu tout en même temps, pour garder un truc homogène, mais yen a trop, et puis ça arrive sans cesse, tu peux pas arrêter, alors du coup t'es pris sous l'éboulement, et c'est dur de sortir de dessous de plein de tas de machins-chose t'sais.
Mais après, je me souviens. Mais genre plus loin. Genre dix ans en arrière. Mais c'pas très intéressant tu vois. La vie d'un type qui sait pas. Pourquoi ? Bah j'viens t'dire ; il sait pas. Genre, il sait pas où il a dormi, il sait pas c'qu'il a manger l'matin, il sait pas quoi. Enfin si il sait, mais il fait comme il savait pas, tu vois, parce que de toute manière, il sait tellement rien qu'un peu plus ou un peu moins, ça fait pas trop de différence. Alors il sait rien. Quand tu sais rien, tu sais pas où tu vas non plus, t'comprends ?  Alors tu traîne dans une taverne et le lendemain tu t'réveilles concierge. Tu te souviens pas de ce qui s'est passé entre. Genre si yavait une annonce dans l'journal qui bougeotte. Ou peut-être le type qui a pris le jus de carotte. Voilà, j'me souviens pas. J'te l'avais bien dit, je sais rien. Mais j'me suis retrouvé là. Dans ce gros truc tout pierreux.
C'est un peu comme une déchetterie.
Sauf que les déchets c'est des paroles.
Et les vieux clodos chelou des élèves.
Moi, je me glisse entre eux, et j'me laisse vivre.
C'est facile. J'ai pas grand chose à faire. Faut juste tourner en rond et surveiller des trucs. J'peux même engueuler. Et puis c'est cool.